23 Février 2025
Sources La Vie du Rail 17/10/1954 https://gallica.bnf.fr/; RGCF juin 1952 https://gallica.bnf.fr/; RGCF nov 1954 https://gallica.bnf.fr/
Locomotive 2300 surnommée « Jawn-Henry »
En juin 1954, la Norfolk and Western Railway mettait en service l’une des plus puissantes locomotives à vapeur du mode du moins dans la catégorie des locomotives non articulées. On voit ci-dessous cette locomotive numérotée 2300 en train d’effectuer des essais entre Roanoke et Bluefield sur le réseau de la N&W.
Pourquoi au milieu du 20ième siècle une telle locomotive à vapeur a-t-elle été conçue ?
Norfolk and Western Railway ne voulait pas se résoudre à franchir le pas du Diesel alors que l’essentiel de son trafic concernait le transport du charbon. Cela aurait été une véritable trahison d’abandonner ce minerai au profit du pétrole, ce concurrent qui visait à supplanter et à même faire disparaitre cette matière première qui constituait la raison d’être de cette société qui était d’autre part propriétaire de mines.
Mais pour lutter efficacement contre les avantages nombreux du Diesel, il fallait changer de paradigme en repartant sur de nouvelles bases novatrices.
Le choix s’était donc porté sur une locomotive à moteurs électriques alimentés par une turbine à vapeur.
En France, à la fin du 19ième siècle, l’ingénieur Heilmann avait eu l’idée de construire une locomotive à vapeur à moteurs électriques. L’idée étant de produire de l’électricité sur le train lui-même en l’équipant d’une machine à vapeur dont le moteur ferait tourner une dynamo qui produirait l’électricité nécessaire à l’alimentation d’autres dynamos disposées sur les essieux.
https://cheminot-transport.over-blog.com/2021/05/la-locomotive-heilmann-8001.html
La voici devant la tour Eiffel.
Caractéristiques générales de la 2300.
Construite par Baldwin et Westinghouse qui ont de très solides références dans le domaine ferroviaire, cette locomotive était impressionnante pas ses dimensions.
De type CC-CC ou 6-6-6-6 en notation de Whyte, ce monstre mesurait 36 m de long (non compris les 15 m du tender) et avait une masse de 532 avec sa citerne d’eau.
La turbine à vapeur avait une puissance de 4500 ch à 8000 tours/minute. L’effort de traction au démarrage atteignait 80 tonnes. En régime continu, à 15km/h, il s’élevait à 65 tonnes.
On la voit ci-dessous remorquant un lourd train de charbon.
Description technique
La chaudière était constituée de tubes à eau. La vapeur était surchauffée à 482°C sous une pression de 42kg au cm2. Les bogies et les moteurs de traction du type 370D2 à 600V, étaient similaires à ceux utilisés sur les machines électriques ou diesel-électrique. De même, l’équipement électrique et les éléments de la turbine correspondaient à des pièces que l’on utilisait habituellement, soit sur du matériel de chemin de fer, soit dans des appareils de la marine.
Un « Stoker » permettait l’alimentation automatique de la grille par le charbon stocké à l’avant de l’engin.
Cette locomotive était dotée d’un frein rhéostatique.
Voici un schéma des dispositifs qui composent la locomotive à turbine à vapeur
Dispositifs de commande
Comme on peut le voir sur la photo-ci-dessous, le poste de conduite comportait un minimum de dispositifs de commande et de contrôle afin de rendre la conduite la plus simplifiée possible.
L’opérateur disposait :
Quant à la commande de la chaudière et de ses organes auxiliaires, celle-ci s’effectuait automatiquement au moyen de 4 dispositifs de commande pneumatique en fonction des indications fournies par les appareils de contrôle sur :
Des enclenchements pneumatiques arrêtaient la distribution du charbon lorsque des anomalies étaient détectées dans le fonctionnement de la chaudière.
Carrière
Malgré des qualités intrinsèques évidentes, cette locomotive, arrivée bien trop tard, n’aura qu’une carrière très brève. Restée en exemplaire unique, elle finira sur une voie de garage en 1958 sans avoir convaincu les dirigeants de la Norfolk and Western.